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Temps de pause et de respiration pour moi alors voici une tribune publiée en 2021 dans Présences magazine. Ce texte contient des déclencheurs d’écriture intime et de mise en voix, si vous voulez vous prêter au jeu de re-découvrir qui vous êtes…
Misfits - 2018 - pencil, baking paper, traces of cookies - Process, manifesto: here
Je voulais vous dire que chaque voix compte. Quelle que soit notre histoire, nous pouvons la porter à notre façon dans le monde pour reconstruire ce sentiment vital d’appartenance.
Les mots sont toute ma vie. Il est facile de se réfugier derrière eux pour cacher qui l’on est vraiment.
J’espère que vous pourrez transposer mon message dans votre propre vécu pour vous sentir fier d’être vous.
Quand on travaille comme auteur, les mots imbibent toute notre vie. Et toute notre vie imbibe nos mots. Je reçois depuis longtemps des retours de lecteurs, clients, abonnés, me disant que j’ai les mots justes.
Pour en arriver là, je n’ai rien fait de spécial sinon écrire à partir de moi. Laissez-moi juste vous raconter comment mon parcours de vie s’est construit autour et par les mots, mais pas seulement. La façon dont nous sommes amenés à nous révéler dans notre plein potentiel est toujours guidée par une blessure profonde. Ces cicatrices que nous portons sont autant d’opportunités de résilience.
Partager nos histoires si vulnérables, prendre la responsabilité de s’approprier nos vécus, c’est rendre justice et soin à l’enfant que nous sommes toujours. À mon sens cela fait partie d’une spiritualité incarnée. C’est ainsi qu’on touche les autres, c’est ainsi qu’on est touché à notre tour. Et c’est ainsi qu’on s’autorise les uns les autres à libérer nos voix.es pour enfin être. Et grandir…
Il y a d’abord eu les mots des autres pour me qualifier depuis l’enfance : petite, timide, intello, « celle qui ne parle pas »… (à partir de là, je vous invite à remplacer mes mots par ceux qui font partie de votre vécu)
Puis les mots que j’ai cherchés de moi-même, parce que les premiers me semblaient éloignés de ma nature profonde, passionnée et rebelle. Le sentiment de ne pas être reconnu pour qui l’on est, engendre un véritable désarroi quand on n’a pas de modèle autour de soi à qui s’identifier. Nous sentons un voile qui nous sépare des autres mais il est impossible de s’en défaire pour apparaître dans notre vérité. J’ai donc tenté de trouver qui j’étais à partir de mes « problématiques ». Il en est ressorti successivement, au fil d’un parcours s’étalant sur des années : phobie sociale, haut potentiel intellectuel, autisme… (et vous, avez-vous cherché des réponses, diagnostics, étiquettes pour vous aider à savoir qui vous êtes ?)
Ce sont là juste des mots parmi tant d’autres qui pourraient me qualifier (tout comme vous-même pouvez-vous décrire à l’aide d’une liste infinie de mots car vous êtes bien plus que ce que vous croyez). Je les partage car je les assume pleinement après bientôt quinze ans à échanger sur internet à ce propos, à témoigner de mon vécu d’abord dans l’anonymat puis publiquement puisque que je n’ai plus honte et que ma démarche professionnelle s’est entièrement construite à partir de mon vécu personnel. Ces mots portent des visions fragmentées de mes multiples identités (Quels sont les mots que vous assumez pleinement pour vous définir ? Et quels sont ceux que vous rêvez qu’on dise à propos de vous ?). Pour moi l’essentiel aujourd’hui est de ne plus me définir mais de m’autoriser à être pour ne plus souffrir des cases enfermantes créées par les autres ou moi-même. L’hybridation dans mon travail artistique illustre bien le fait que je me sente aux intersections. C’est à la fois joyeux et inconfortable : cela me permet de rester (r)éveillée car sensible aux réalités multiples vécues par les autres. De m’engager auprès de voix dites différentes et discriminées.
La douleur de se sentir séparé des autres est indicible mais physiquement palpable. Le sentiment de rejet, d’invisibilité, de se sentir semblable en apparence mais différent au fond de soi, est parfois insoutenable. C’est à cause ou plutôt grâce à cela que j’ai constamment cherché l’harmonie entre moi et le monde pour réparer cette faille. C’est comme ça qu’à l’aube de ma majorité, la découverte du bouddhisme a constitué une de mes voies de résilience, un repère fiable et libérateur orienté vers la non dualité. Tomber l’ego, non je n’y suis pas encore arrivée évidemment ! Mon idéal demeure de réunifier tout ce qui est possible et ironie logique de l’histoire, je tends désormais à rejeter tout ce qui est synonyme de séparation, de discrimination.
Les étiquettes que nous nous attribuons nous-mêmes sont importantes quand nous sommes en quête d’identification et de rapprochement des autres. (peut-être êtes-vous dans cette quête en ce moment, et il est bon de chercher des pairs quand on s’est senti si longtemps isolé – alors respectez votre besoin de comprendre, de vous identifier pour un temps). Pour moi, ces étiquettes ne doivent pas servir à se complaire dans un entre-soi fermé. Au contraire, elles doivent être dépassées pour rejoindre l’unité et reconnaître avec le cœur les autres singularités. Dans une conférence sur l’hypersensibilité que j’ai donnée il y a deux ans, j’ai vivement encouragé les participants à faire de leur sensibilité une porte d’ouverture sur le monde, de reliance aux autres. C’est tout un chemin que de passer d’une singularité assumée à un sentiment universel d’appartenance. « Voici comme je suis, je me reconnais ainsi. Et sans être à ta place je sais que toi aussi tu te reconnais d’une façon unique. Si tu me racontes comment tu te vis, nous nous découvrirons sûrement des points communs, au-delà des apparences qui nous séparent ».
Nous sommes tous amenés à rejoindre l’unité. En dehors de toute considération idéologique, nous sentons intimement comme nous avons tout autant besoin de nous sentir reconnus pour qui nous sommes, que de nous fondre sans distinction dans le monde afin d’œuvrer pour le bien commun à partir de notre individualité.
Oublier qui nous sommes, tout en le ressentant profondément. Au point de ne plus avoir besoin de s’y attacher. Mais avant cela, encore faut-il s’autoriser à vivre pleinement son histoire, savoir d’où nous venons, partager ce que nous pouvons de notre intime, avec ou sans les mots. Incarner. Sans les histoires des autres nous ne pouvons nous sentir humains. Le monde a besoin d’entendre plus d’histoires singulières, de celles qu’on croit être seul à vivre parce qu’elles ne sont nulle part, ni dans les chansons ni dans les livres. J’écris les mots que j’aurais eu besoin de lire étant petite, puis adulte, pour ne pas avoir honte ni de ce que je suis ni de ce que je vis, pour m’inspirer et me redonner l’élan d’aller vers ma liberté. Pour pouvoir me dire :
« Quelque part dans ce monde, quelqu’un d’autre a vécu ce que je pensais être seule à vivre et ressentir. Et mieux encore, quelqu’un a réussi à faire de tout ça un espace de liberté ! »
Ce n’est pas facile de trouver comment vivre son histoire. Y compris si comme moi, vous êtes constitué de mille facettes contradictoires aux yeux des autres – appartenances multiples, parcours professionnel non linéaire, choix de vie peu communs.
Les mots sont toute ma vie mais ils nourrissent trop le mental si je m’y complais. Être c’est avant tout habiter son corps, sa voix, prendre place. De façon douce et puissante, bien au-delà de la surface des mots.
La pratique de la voix telle que je l’expérimente et la transmets, est ce qui m’aide dans mon corps à réunifier et apaiser toutes les parts de moi. Celles que j’ai tues ou cachées trop longtemps, celles qui peuvent être sous contrôle, inhibées, pour ne pas paraître « trop » ceci ou cela (Comment faites-vous pour vous sentir réunifié ?).L’expérience de la réunification par la voix, par de simples sons, est pour moi la façon la plus joyeuse, simple, puissante, de vivre, sans plus me poser de question sur qui je suis ou ce que je devrais être. Nous sommes alors au-delà des interprétations et des charges émotionnelles des mots : nous vivons l’unité dans la vibration des sons purs, dénués d’intention. Me relier à ma voix est donc pour moi la voie que j’ai adoptée pour ne plus me sentir écartelée entre toutes mes facettes, et pour ne plus me sentir séparée du monde. Sentir que j’incarne mon histoire et crée ma vie au sens propre, d’une façon unique. C’est là que je puise la force d’écrire. (Avez-vous déjà imaginé sublimer votre vécu sans avoir à tout dire, tout détailler, juste par le son de votre voix ?)
S’il n’y avait pas cette pratique de chaque jour, en corps, en voix, mes mots ne me nourriraient plus et ne résonneraient plus chez les autres. Ils finiraient par s’éteindre, par devenir insipides. Mon travail de création poétique est toujours relancé par l’expérience vocale, spontanée, joyeuse, terriblement vivante, l’air et le feu à la fois. (Quelles parts de votre histoire votre voix a-t-elle envie de dé-voix-ler, en mots ou par la simple transmission de l’émotion du son ?)
La pratique que j’ai créée autour du corps, des mots et de la voix s’appelle Mémovoix pour cette raison : nos mots alimentent notre voix chantée via notre corps, notre expérience de la voix alimente nos mots, ceux que l’on écrit et ceux que l’on prononce. C’est une pratique qui accueille chacun et chacune sans distinction, parce qu’évidemment j’ai à cœur d’en faire un creuset de réunification en soi mais aussi avec les autres.
Dans cette période bouleversante que nous traversons, il est pour moi indispensable de reprendre conscience de ce qui nous réunit. Et vivre ces espace-temps d’union à soi et au Tout nous ramène à la maison, dans notre voix, le berceau de l’expression de notre nature profonde. Chaque fois, ouvrir la porte de sa voix c’est comme renaître à soi, refaire le chemin de réveiller le corps et sortir le premier son.
Vibrer de se sentir vivant, semblable et différent, différent et semblable.
Voilà mon histoire. Chaque voix compte, votre histoire aussi.
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Misfits - 2018 - pencil, baking paper, traces of cookies - Process, manifesto : click here
August means pause and breathing time for me so here is an article published in 2021 in Presences magazine. It contains writing prompts and voicings, if you want to try to (re)meet your Self…
I wanted to tell you that every voice counts. Whatever our history is, we can take it our way around the world to rebuild that vital sense of belonging.
Words are my life. It’s easy to hide behind them to hide who you really are.
I hope you can translate my message into your own experience to feel proud to be you.
When you work as an author, words imbibe your whole life. And your whole life imbibes your words. I have been getting feedback from readers, customers, subscribers, telling me that I have the right words.
To get there, I did nothing special except write from me. Let me just tell you how my life journey was built around and by words, but not only. The way we are brought to reveal ourselves in our full potential is always guided by a deep wound. The scars we carry are opportunities for resilience.
Sharing our stories so vulnerable, taking the responsibility to take ownership of our experiences, is to render justice and care for the child that we always are. In my opinion, this is part of an embodied spirituality. This is how we touch others, this is how we are affected. And this is how we allow each other to free our voices to finally be. And grow…
First there were the words of others to describe me since childhood: small, shy, intellectual, «the one who does not speak»… (from there, I invite you to replace my words by those who are part of your experience)
Then the words I looked for on my own, because the former seemed far removed from my deep, passionate and rebellious nature. The feeling of not being recognized for who you are, generates a real distress when you have no model around you to identify with. We feel a veil that separates us from others but it is impossible to get rid of it to appear in our truth. So I tried to find who I was from my «problems». It emerged successively, over a course spanning years: social phobia, high intellectual potential, autism… (and you, did you look for answers, diagnoses, labels to help you know who you are?)
These are just some of many words that could qualify me (just like you can describe yourself with an infinite list of words because you are much more than you think). I share them because I fully assume them after almost fifteen years of exchanging on the internet about this, to testify of my experience first in anonymity and then publicly since I am no longer ashamed and my professional approach was built entirely from my personal experience. These words carry fragmented visions of my multiple identities (What are the words you fully assume to define yourself? And what are the ones you dream to be said about yourself?). For me the main thing today is to no longer define myself but to allow myself to be so as not to suffer from the enclosing boxes created by others or myself. The hybridization in my artistic work illustrates the fact that I feel at intersections. It is both joyful and uncomfortable: it allows me to stay (r)awake because sensitive to the multiple realities experienced by others. To engage with so-called different and discriminated voices.
The pain of feeling separated from others is unspeakable but physically palpable. The feeling of rejection, of invisibility, of feeling similar in appearance but different in the depths of oneself, is sometimes unbearable. It is because or rather because of this that I have constantly sought harmony between myself and the world to repair this flaw. This is how, at the dawn of my majority, the discovery of Buddhism was one of my ways of resilience, a reliable and liberating landmark oriented towards the non duality. To fall the ego, no I have not yet arrived obviously! My ideal remains to reunite all that is possible and logical irony of history, I now tend to reject everything that is synonymous with separation, discrimination.
The labels we assign to ourselves are important when we are looking for identification and reconciliation of others. (maybe you’re on this quest right now, and it’s good to look for peers when you’ve felt so isolated – so respect your need to understand, to identify for a while). For me, these labels should not be used to indulge in a closed relationship. On the contrary, they must be overcome in order to reach unity and recognize with the heart the other singularities. In a conference on hypersensitivity that I gave two years ago, I strongly encouraged participants to make their sensitivity a gateway to the world, to connect with others. It is quite a journey to move from an assumed singularity to a universal sense of belonging.
“Here I am, I recognize myself. And without being in your place I know that you also recognize yourself in a unique way. If you tell me how you live, we will surely discover common points, beyond the appearances that separate us.”
We are all called to join the unity, whichever form or commitment it takes in our lives.
Apart from any ideological consideration, we feel intimately as much as we need to feel recognized for who we are, as to blend without distinction into the world in order to work for the common good from our individuality.
To forget who we are, while feeling it deeply.
To the point of no longer needing to attach oneself to it.
But before that, we must allow ourselves to fully live our history, know where we come from, share what we can of our intimate, with or without words. Embody. Without the stories of others we cannot feel human. The world needs to hear more singular stories, stories that we think are alone to live because they are nowhere, neither in songs nor in books. I write the words I would have needed to read as a child, then as an adult, not to be ashamed of who I am or what I live, to inspire me and give me the impetus to go towards my freedom. To be able to tell me:
“Somewhere in this world, someone else went through what I thought was being alone to live and feel. And better yet, someone managed to make it all a space of freedom!”
It’s not easy to figure out how to live your story.
Even if, like me, you are made up of a thousand contradictory facets in the eyes of others – multiple memberships, non-linear career paths, unusual life choices.
Words are all my life but they feed the mind too much if I indulge in them. To be is above all to inhabit his body, his voice, take place. Softly and powerfully, far beyond the surface of words.
The practice of the voice as I experience and transmit it, is what helps me in my body to reunify and soothe all parts of me. Those that I have killed or hidden too long, those that can be under control, inhibited, so as not to appear «too much» this or that (How do you feel reunified, fully aligned?).
The experience of reunification by voice, by simple sounds, is for me the most joyful, simple, powerful way to live, without any more question about who I am or what I should be. We are then beyond the interpretations and emotional loads of words: we live unity in the vibration of pure sounds, devoid of intention. Connecting with my voice is therefore for me the way I have adopted to no longer feel torn between all my facets, and to no longer feel separated from the world. Feeling that I embody my story and create my life in a unique way. This is where I draw the strength to write. (Have you ever imagined sublimating your experience without having to say everything, detailing everything, just by the sound of your voice?)
If there were not this daily practice, in body, in voice, my words would no longer nourish me and would no longer resonate in others. They would eventually die, become tasteless. My work of poetic creation is always revived by the vocal experience, spontaneous, joyful, terribly alive, air and fire at the same time. (What parts of your story does your voice want to unveil, in words or by the simple transmission of the emotion of the sound?)
The practice I have created around the body, words and voice is called Mémovoix for this reason: our words feed our singing voice through our body, our experience of the voice feeds our words, those we write and those we pronounce. It is a practice that welcomes everyone without distinction, because obviously I have at heart to make it a melting pot of reunification in itself but also with others.
In this moving period, it is essential for me to regain awareness of what brings us together. And living these space-times of union to oneself and to the Whole brings us back home, in our voice, the cradle of the expression of our deep nature. Each time, opening the door of his voice is like being reborn to oneself, redo the way to wake the body and release the first sound.
Vibrate to feel alive, similar and different, different and similar.
That’s part of my story. Each voice matters. And your story matters.
If this resonates, please share my voice !
Beyond labels - Au-delà des étiquettes
I would frame this as each person being in image of G-d, but we're more or less saying the same thing.