Cette histoire n'est pas la mienne / This is not my story
Trouble & identification / Dignity for our bodies.HeArts
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Je vis dans une ville qui abrite chaque année le plus grand festival de théâtre du monde : provocant, drôle, poétique, absurde, politique, témoignages, rires, pleurs, rien comprendre, être émerveillé… tout cela entendu, ressenti, donné à voir dans une seule place.
Je-nous vivons dans un corps.voix qui abrite une infinité de nuances et de ressentis : des tonnes d’eau qui finiront en urine, sueur, larmes de rire ou de chagrin, voix internalisées de notre passé tenues bien secrètes ou voix de nos rêves espérés, vibrations de mon-nos coeurps qui finissent en chansons ou mots sur la page ou sur le clavier… tout cela dans un seul amas de cellules reliées les unes aux autres, de je à nous.
“Cosmogonies du monde comme un coquelicot pour les moutons noirs” (petite impro spontanée à partir des titres des affiches sur la photo ci-dessus)
Le théâtre tout comme les arts vocaux, chanter, ou écrire, c’est une place sacrée qui nous invite à un cheminement spirituel.
- Est-ce mon histoire que je viens d’entendre sur la scène?
“Non. Je ne suis pas + noir/queer/adopté/habitant d’un pays en guerre/religieux/handicapé/invisible/malade chronique/artiste/pauvre/comme toi…”
Ah, parfait! Donc ce que dont tu entends parler c’est exactement ton histoire.
Le pouvoir des mots combinant art et spiritualité est de venir nous toucher pile poil là où notre coeurps est prêt à s’élargir. Et le plus tu élargis ton territoire (du coeurps ;) en accueillant les histoires des Autres en toi, le plus tu te sens appartenir au monde.
Cette histoire qui n’est pas la mienne, c’est celle de mon frère/voisin/amour/prochaine relation…
Le pouvoir des mots du coeurps est de nous révéler à nos failles les plus profondes et inconnues… D’abord tu t’identifies totalement à ce que tu entends d’une histoire, ou bien tu la rejettes totalement - c’est la même chose! Puis si tu observes le contenu de cette expérience pour ce qu’elle est, un produit du mental venant des tripes et du coeur pour toucher le monde, alors tu peux enfin accéder au goût de l’unité, pour un instant ou plus.
Parfois je sens mon coeur minusculement resserré parce que j’ai assez à faire avec moi-même et mes propres petites histoires de souffrance réelle. Mais l’art aide toujours mes cellules à se souvenir que nous sommes Un et que je-nous créons pour élargir le monde, pas pour faire de celui-ci une poubelle pour les émotions non digérées….Bien, tout ça ce sont des mots moralisateurs tant que tu ne l’as pas vécu dans ton coeurps.
J’avais lu tout ça mais ça m’a pris longtemps de le vivre dans ma chair pour l’intégrer : je-nous est Un. Nous avons à la fois à reconnaître les singularités de chacun ET dans le même temps à rester relié à ce plus grand que nous qui nous fait tous semblables au fond. Tant que nous restons conscients de ce paradoxe de l’unité dans la diversité, alors nous sommes vivants et nous pouvons incarner un peu beaucoup d’humanité et de compassion.
Je pourrais vous dire que mon propre corps.voix se sent actuellement menacé par ce qui va sortir comme résultat des élections de demain en France. Mais ce serait indécent parce que je suis blanche et que je porte un nom français. Ce luxe de naissance coexiste avec toutes mes facettes qui sont déjà rejetées par une société capitaliste, patriarcale, validiste, bref tout ce qui rend ma vie plus compliquée que d’autres sur le plan matériel, relationnel, professionnel, médical. Mais je je m’identifie pas à une histoire de victime, parce que je sais que d’autres souffrent bien plus et sont pourtant dans l’expérience d’une vie de joie et de dignité - et je pourrais jamais les enfermer dans ce que le système veut raconter d’eux, qui est si limité et limitant. Nous sommes libres de ce que nous nous racontons à propos de notre corps et de celui des autres.
Je fais juste ce qui me semble la meilleure façon de préserver la liberté de chacun, la démocratie, et l’art.
Ci-dessous un texte écrit pendant le confinement de 2020. Acte de foi, tentative de rappel, volonté d’embrasser toute l’expérience lucide du chaos et de la souffrance humaine pour mieux s’en libérer grâce à ce trésor que Thich Nhat Hanh nomme “l’inter être”. Ne pas se sentir séparé est la clé pour se libérer (oui ça demande un chemin , non ça n’est jamais acquis, tout comme les droits et les libertés).
RELEVER LES CORPS
Je vis décalée des rythmes du monde.
Pourtant, ces jours-ci, je me sens comme embarquée de tout mon corps avec les corps des autres, un radeau entier sur une mer en furie.
Etrange sensation pour quelqu’un qui n’a longtemps pu se définir que comme une fragmentary girl.
Mon corps comme un bout de ce grand corps, dont je ressens physiquement les trépidations, les soubresauts, les suffocations. Irrémédiablement, les connexions se font organiques et entraînent vers un agrégat de par-Celles mobiles, de(A)nses et colorées.
Des blocs de plus en plus serrés qui effacent les interstices, malgré des luttes intestines vivaces et les chaînes qui s'enfoncent dans les chairs.
Un mouvement contractile qui va bien finir par ériger quelque chose, même s’il faut encore retomber plusieurs fois pour ça.
Mais relever les corps.
Plus de pieta pasolinienne qui dénonce le déterminisme.
Des corps enchaînés pour le meilleur cette fois.
Un par un, ascensionner tous les étages de la cordée, en commençant par ceux à terre depuis toujours. Ceux qu’on nomme les boulets, les assistés, ceux qu’on nomme mal ou qu’on ne prend même plus la peine de nommer.
La tête, la relever en dernier, quand l’axe sera enfin redressé, le monde tournant dans le bon sens.
Dignité. De la tête aux pieds, un seul corps organisé et debout. Un corps enfin relevé.
#dignité #corps #corporéité #interdépendance #intersectionnalité #invisibilité #convergence #fragmentation #unité #radeaudelaméduse #pasolini #pieta #monotype
Extrait de CORP(S)-US la délicate articulation du je-nous, 2020
Après vous avoir écrit cette lettre, je vais aller écouter une discussion autour des droits des personnes trans genres, avec entre autres Paul Preciado.
- Oh tout ceci semble si sérieux, si déprimant!
- Oh tout ceci est simplement la Vie et je suis curieuse de sentir ce que mes cellules vont recevoir de chocs, douceur, questionnements, saveurs étrangères, joie… tout ce qui fait que les histoires des Autres-Moi rendront mon petit monde un peu moins étroit, et plus libre… Que va-t-il ressortir de tout ça dans mon coeurps? Les histoires des autres sont aussi les miennes, même si elles semblent éloignées de ma réalité, et pourtant si proches puisque des gens que j’aime les vivent pour de vrai, et des gens qui m’inspirent (ce qui est pour moi un besoin vital au même titre que manger, boire, dormir).
Méditer et prendre soin
Puisque prendre soin de soi et du monde, c’est la même chose quand on le fait avec conscience de la reliance, je vous propose quelques instants audio de méditation.
Si votre coeurps a besoin de détente, compréhension, régénération, voici ma playlist de méditations et talks sur Insight timer.
> Insight timer est l’application de méditation gratuite n°1 dans le monde.
Et les pistes ci-dessous sont aussi gratuites (ce ne sera pas le cas des cours que je proposerai prochainement) :
Au plaisir de vous compter parmi mes followers sur Insight timer.
Vers vous Joie et chaleur de la dignité pacifiée des coeurps,
Marion Dorval
Hybrid artist & Bodyvoice flow practitioner Praticienne Bodyvoice flow
Réparer.Libérer.Incarner ∞ Touch.Vibrate.Resonate
I live in a city that hosts the biggest theater festival each year : provocative, political, poetical, testimonies, laughing, crying, misunderstanding, stunning… all in a same place is heard, shown, received.
I-we live in a bodyvoice that hosts a whole world at each moment : inner voices from the past or from my dreams, cells constantly dying and rebirthing, tons of water to exsude through sweat or pee, tears of laugh or sorrow, vibrations in my body.heart that transmute themselves into songs, movements or words on the keyboard or the page… all in a same place is lived with infinite degrees of sensitivity and visibility.
Theater like all vocal arts, whether singing or writing, is a sacred place that invites to a spiritual journey.
Is it my story that I’ve just heard on the stage?
“No. I’m not + black/queer/adopted/living in a time of war/religious/disabled/invisible/chronically ill/artist/stranger/poor/like you…”
Ah, perfect ! So this is exactly your story.
The power of the words when they combine spirituality and art is that they touch you deep inside just where your body heart is ready to open more. And to increase your territory by hosting other stories inside of you : the stories of the Others. The Others you might have been someday, or you might become another one, or that your friend/lover/parent might currently live.
The power of the words is to reveal yourself to your deepest unknown. First you might totally identify yourself with what you read or hear, or totally reject it - that’s the same. Then if you observe the content of the experience for what it is, a product of the mind coming from bodies and hearts trying to touch the world, you might get access to unity.
Love is not this tiedous thing we were taught and the journey to truly understand that what we live in our bodies is litteraly interconnected to what others live even if it seems very far from our own story, this Love journey takes practice. Especially to not get trapped by the identification. Just recognize that we have a body, a voice, a story. But we are not this body, this voice, this story. We are much more infinite. We are all the other stories too.
Some days I feel my heart is so tiny and I think I have enough to do with myself and all my own little stories. But art helps me to remind my cells that we are all One, and that what I-we create is aimed to expand the world, not to take the world for a bin for unmetabolized emotions. These are just preachy words until you live it in your body heart.
I perfectly understood this in my readings but this was nothing until I made the experience. I-we-they is the same AND yet we have to constantly recognize the unicity in each one of us. As long as we can sit with this paradox, we may get a chance to live Alive and to embody compassion.
Theater mixes the worst and the best of our world.
I could tell you my own body voice that is currently threatened by what might comes out of the french elections tomorrow, but I won’t be indecent since I am white and have a french name. This birth luxury coexists with all my facets that are already rejected by a capitalist, patriarcal, validist system, which makes my life much more complicated than other ones for relations, business, health, money. But I don’t identify with a victim story, because I know people suffering much more and yet living in joy and dignity and I would not consider them as victims - they know they are more than what the system wants them to be.
And for me, I just do what seems to me the best way to preserve freedom, democracy, and Art.
Below is an extract of a text I wrote during the lockdown in 2020. It is a powerful statement that expresses my faith in the human race. Non duality means to recognize and to let go in order to embrace the Wholeness. Beyond the current experience of disharmony and conflict, our body voice through their ebbs and flows is a key to experience the vital interbeing that makes us alive AND humans.
RAISE THE BODIES
I live off the beat of the world.
Yet, these days, I feel like I am embarked with my whole body with the bodies of others, an entire raft on a furious sea.
Strange feeling for someone who could only define herself as a fragmentary girl.
My body like a piece of this huge body, of which I physically feel the tremors, the jolts, the suffocations. Irremediably, connections become organic and lead to an aggregate of mobile and colored parts.
Increasingly tight blocks that erase the gaps, despite lively infighting and chains that sink into the flesh.
A contractile movement that will end up erecting something, even if we still have to fall several times for that.
But raise the bodies.
No more Pasolinian pieta denouncing determinism.
Chained bodies for the best this time.
One by one, climb all the floors of the rope, starting with those on the ground since always. Those who are called meatballs, those who are assisted, those who are misnamed or who are no longer bothered to name.
The head, raise it last, when the axis will finally be straightened, the world turning in the right direction.
Dignity. From head to toe, one body organized and standing. A body finally raised.
#dignity #body #corporeality #interdependence #intersectionality #invisibility #convergence #fragmentation #unity #radeaudelaméduse #pasolini #pieta #monotype
Extract from CORP(S)-US la délicate articulation du je-nous, 2020
So here we are. After writing to you this letter, I will leave the house to attend a talk around the trans people rights with Paul Preciado.
- Oh this seems so serious and depressing!
- Oh this is just life, and I’m curious to understand, not understand, curious and ready to receive Love from words and experiences of Others-Me, which might seem so far but at the same time so near to people I care for and others that inspire me (which is a vital need for my body.heart).
Take care of your Path.Art,
Marion